Les Trabucayres

Venant de Bassagoda, les Trabucayres arrivent au mas d’en Cors, à St Laurent de Cerdans, où ils pénètrent en dépit du métayer Jean Peytavy et après avoir fait un siège en règle. Ce n’était pourtant pas là le refuge qu’ils avaient choisi pour se mettre à l’abri des recherches. Ils voulaient se rendre au cortal de l’Aloy, à Corsavy. Pendant longtemps ce mas, qui s’appelait auparavant Puigsech, avait appartenu à la famille Delclos, dont le dernier propriétaire, Aloy Delclos, était parti à Finestret, et qui appartient maintenant à Jules Deit. Le nouveau fermier du Cortal de l’Aloy, Laurent Claret, arrive à Corsavy en 1840, âgé de 38 ans, venant de Coustouges. Il a avec lui son père Joseph Claret, sa 2ème épouse Anne Délos qu’il vient d’épouser, et son fils Joseph âgé de 1 an fils de sa 1ère épouse Marie Vicens qui est décédée l’année précédente à Coustouges. En 1845, le jeune Joseph Courdomy est employé au mas de l’Aloy comme jeune berger.

Il était arrivé tout jeune à Corsavy il y a une quinzaine d’années, venant de Vilalonga de Ter, avec son grand-père Jean Courdomy, ses parents Martin Courdomy et Marguerite née Corona, et son demi-frère beaucoup plus âgé Simon Brunet, fils de sa mère et de son 1er mari Joseph Brunet qui était tisserand à lin à Vilalonga. Dans les années 1830 son grand-père et son père décèdent, et son ½ frère Simon Brunet, mineur à Batère, se marie en 1835, il a 23 ans, avec Françoise Tixador
Autre protagoniste de l’histoire, le curé André Lacase, âgé en 1845 d’une quarantaine d’années. Son père François Lacase est décédé à Céret et sa mère Thérèse, née Caball, originaire de St Laurent de Cerdans, habite avec lui.
Le 2 mai 1845, un des enfants de Sébastien Barnèdes, dit « Tia dels Maners », fut envoyé au cortal de l’Aloy pour prévenir le fermier Laurent Claret qu’il était attendu le soir même au mas d’en Cors. Claret vint en toute hâte et arrivait à 9 heures du soir. Sur l’insistance de Barnèdes, il consentit à cacher dans sa ferme, pour 3 ou 4 jours, quelques jeunes gens qui, lui dit-il, sortent des dépôts et voudraient passer secrètement en Espagne. Je les garderai, répondit Claret, pourvu que ce ne soient pas des Trabucayres.


On se mit donc en marche et la bande arriva à Corsavy vers trois heures du matin, Dès leur arrivée, Claret se mit en mesure de tuer un agneau pour nourrir ses hôtes. Ils se couchèrent au grenier à foin où ils demeurèrent pendant trois jours. Entre temps, le fermier Peytavy avait avisé la police de la présence des malfaiteurs et lui indiqua le lieu où ils étaient cachés.


Le 5 mai 1845, les douaniers et les gendarmes d’Arles-sur-Tech, renforcés par une compagnie d’infanterie, cernèrent le mas de l’Aloy. La porte étant ouverte, quatre hommes sortirent précipitamment de la grange. On les somma de s’arrêter, mais ils prirent la fuite. Un officier commanda de faire feu et l’un des bandits, Michel Bosch, tomba mortellement blessé. Les autres furent poursuivis et capturés après en avoir blessé un au talon. Quand le Commissaire de police revint à la grange, il ne trouva que dix prisonniers. On découvrit le onzième dans une crèche où il se tenait caché, c’était Forgas, dit Menut.
Michel Bosch, se sentant mourir, demanda l’assistance d’un prêtre. L’abbé Lacase, curé de Corsavy, témoin de cette scène, reçut sa confession.
Gardez-les bien, s’écria le prêtre en passant devant les prisonniers. Ce sont des scélérats !
Solidement liés, les malfaiteurs furent dirigés vers la prison de Céret. En route. l’un des bandits fit remarquer aux gendarmes : si nous avions été armés, vous ne nous conduiriez pas ainsi attachés.
Les Trabucayres, afin de ne pas être soupçonnés par le fermier Claret, avaient, en effet, abandonné leurs armes qu’ils avaient cachées près du mas d’en Cors, où on les retrouva plus tard...
Le lendemain de l’arrestation des bandits, un jeune berger du mas Joseph Courdoumy, étant monté au grenier à foin, trouva un panier qu’il eut la curiosité d’ouvrir. Quel ne fut pas son effroi lorsqu’il découvrit, au milieu de taches de sang, deux oreilles humaines auxquelles adhéraient encore quelques cheveux de l’infortuné jeune homme, car ces oreilles étaient celles de Massot. Les assassins les laissèrent providentiellement à cet endroit sans se douter qu’elles serviraient de pièces à conviction pour le procès. Mises sous leurs yeux pendant l’instruction, les bandits feignirent de se méprendre et, mêlant la bouffonnerie à l’audace, ils répondirent « ce sont des champignons »
Ces oreilles furent conservées au greffe du Tribunal civil de Perpignan, en attendant la cession de la cour d’assises...

Laurent Claret continua d’exploiter le mas de l’Aloy. Après son décès en 1871, son fils Joseph qui s’était marié avec Honorée Maler, reprit le fermage. jusqu’à son décès en 1887. Laurent Claret avait eu avec Anne Délos un garçon, Laurent, et trois filles. Laurent s’est marié en 1875 avec Marie-Thérèse Baills : il est décédé deux ans après. Les filles se sont mariées l’une avec Philippe Nivet de St Laurent de Cerdans, une autre avec Justin Maler maréchal-ferrant à Arles sur Tech. Quant à la plus jeune, Marie, elle épouse Michel Faix ; elle décède à Corsavy en 1939.

Joseph Courdomy, comme son frère, est devenu mineur. Il épouse en 1853 Thérèse Gource ; il décède en 1892

Le curé André Lacase décède en 1863.et sa mère en 1964